Au début des années 80 je travaillais comme chercheur dans les archives historiques de Rome. Mais je m’y sentais à l’étroit et ma quête d’une vérité donnée périclitait déjà. Je piquais des petits bouts de papier dans les dossiers des XVIII et XIX siècle, souvent du papier brouillon qui avait servi à essuyer les plumes des scribes ; j’en faisais des collages et des aquarelles que j’envoyais à mon ami Rodolphe Burger, qui à l’époque enseignait la philosophie en Alsace. A mon insu, Rodolphe collectait ces travaux et, quand il estima en avoir assez, se mit à démarcher les galeries. Un jour de l’été 1985 il m’écrivit que j’allais avoir une exposition à la galerie ADEAS de Strasbourg.
Je pris un train (à l’époque il y avait encore des trains de nuit qui traversaient l’Europe) et arrivai à la gare de Strasbourg un matin très tot. Rodolphe m’attendait sur le quai , accompagné d’un autre grand type d’arien, Philippe Poirier. Ils m’accompagnèrent prendre le petit déjeuner dans le seul bistrot ouvert à six heures du matin, le Cafè Italia. Sur la porte vitrée, la vue d’une affiche me frappa comme un coup de poing : Salvatore Puglia, exposition, Falsapartenza.
Pendant une semaine Philippe, qui ne me connaissait pas auparavant, m’aida à monter cette première exposition, à l’issue de laquelle je pris le courage de quitter mon travail et mon pays pour aller voir si j’étais aussi “autre chose”.
Rodolphe et Philippe sont, avec les amis qui m’accueillirent à mon arrivée à Paris, les responsables de ma présence à Arles, comme artiste, en 2015. Tout ce que vous verrez dans cet Inventaire, c’est de leur faute.