L’histoire des établissements supérieurs de formation des maîtres remonte, en France, au XVIIIe siècle, bien que l’on puisse considérer le nîmois François Guizot comme leur fondateur. Et la question de l’instruction publique est un sujet crucial, comme on le sait bien, dans la construction d’une communauté (nationale ou extra-nationale).
Le site de Nîmes de la faculté d’éducation de Montpellier (ex IUFM) occupe l’ancien bâtiment de l’Ecole normale primaire, rue Vincent Faïta. Cet établissement fut fondé en 1869, à la suite de la législature Guizot. En 1883 on créa aussi, rue Meynier de Salinelles, l’Ecole normale d’institutrices. C’est dans cette école que Marie Soboul, venue d’un village d’Ardèche, enseigna et fut ensuite directrice (de 1926 à 1940). Marie Soboul, licenciée par Vichy, affiliée à la résistance sous le nom de Valérie, hébergea dans sa maison du quartier de la Tour Magne les premières réunions du Comité de Libération.
Pour cette raison et pour d’autres vous verrez comment l’histoire du 62 rue Vincent Faïta résonne avec celle de la Résistance dans le Gard.
Comment rendre compte de l’histoire d’un lieu et du problème de l’instruction de manière non seulement documentaire mais aussi « artistique »?
Une « boîte » à documents . Les vingt-six mètres linéaires des murs de la salle d’exposition sont couverts, à hauteur de deux mètres, de textes agrandis et reproduits sur papier (soit, 52 mètres carrés par bandes de 90 cm de largeur). Ces textes (issus d’Internet et des archives départementales) sont présentés à l’état brut, sans correction, en police courier et en continu comme un télex. Des interventions à la main (en rouge fluo ou en marqueur jaune) soulignent certains passages ou donneront des intitulés aux panneaux. Les sources des documents sont toujours citées.
Des « paravents ». J’ai fait construire par le serrurier Laurent Rump cinq cadres métalliques sur roulettes, au format 190×190 cm. Ces cadres portent de grandes reproductions photographiques des lieux mêmes où ils sont installés (réfectoire, cour, salle des professeurs), mais les images datent de cent cinquante ans plus tôt. Elles sont reproduites sur un support translucide (papier calque pour les intérieurs et polyester pour les extérieurs). Cela donne des rideaux mouvants et une modulation des espaces.
Un rideau est en même temps un écran et une séparation, mais c’est aussi une transition, un passage spatial, dans ce cas-là, temporel. Par moments on aura, en rentrant dans une salle ou dans une cour, la sensation d’un déplacement dans le temps.
C’est ce déplacement qui devrait susciter en même temps une conscience historique et une émotion esthétique.
with an article in the Midi libre