Land paintings, peintures terrestres.
J’expose à Lasalle un travail récent sur le rapport de conflit et d’intégration entre nature et civilisation. J’ai réalisé dans les dernières années une série de pièces autour de la question de la nature qui reprend possession des lieux abandonnés par l’homme, qui interroge la relation entre vestiges de l’histoire et milieu rural. Il s’agît d’œuvres conçues à partir de photographies prises dans le Gard ou dans la Tuscie, en Italie centrale.
Je les appelle « land paintings », en référence au Land art mais aussi à une pratique d’intervention picturale dans les sites historiques. Je les montre en vrac sur un seul mur, comme dans une « quadreria » baroque, hors hiérarchie de format ou de sujet.
S.P., mars 2023.
Objet des récentes explorations de Salvatore Puglia, des régions aujourd’hui difficilement accessibles et peu peuplées, comme la Tuscie au nord de Rome, parsemées de sites archéologiques abandonnés où les ruines recouvertes, de la Préhistoire à nos jours, gardent les traces de leurs fonctions successives : tombes étrusques, refuges de guerre ou bergeries. A tour de rôle, la végétation ou l’intervention humaine ont eu raison de l’autre. En introduisant sur ces lieux des objets étrangers et anachroniques, en forme de langues ou de feuilles en latex, aux couleurs fluorescentes, Puglia opère une nouvelle stratification de lexiques qui, tout en renvoyant à l’Histoire de l’art, trouble le rapport au temps et la vision romantique du paysage.
Dans ces images, désignées par Puglia, “Land Paintings“, on retrouve ses préoccupations d’investigation historique et ses dispositifs créatifs habituels. Mais la surprise est permanente pour ce qui concerne les lieux revisités et la juxtaposition des éléments glissés ou cousus dans les images. Des animaux sauvages apparaissent dans une campagne domestiquée ; des traces incongrues d’un passage humain récent investissent des sites à la végétation impénétrables ou des espaces aseptisés. Une langue enduite de pigment rouge fluorescent, rend tout son pouvoir à l’Ogre de Bomarzo, un des monstres de ce parc, extravagance de la Renaissance et repaire de dragons, sphinx et demeures penchées. A partir de l’introduction in situ d’un élément qui une fois photographié donne vie à une œuvre à part entière, Puglia produit ce qu’il appelle une archéologie inversée en ajoutant de nouvelles stratifications à celles existantes.
Laura Serani, Le jardin des monstres (exposition à la galerie Sit down, Paris 2014).